L'événement de ta mort a tout pulvérisé en moi.
Tout sauf le coeur.
Le coeur que tu m'as fait et que tu continues de me faire, de pétrir avec tes mains de disparue, d'apaiser avec ta voix de disparue, d'éclairer avec ton rire de disparue.
Je t'aime : je ne sais plus écrire, je ne vois plus que cette seule phrase à écrire, c'est toi qui m'as appris à l'écrire, c'est toi qui m'as appris à la prononcer comme il faut, avec une énorme lenteur, en détachant chaque mot, avec une lenteur de plusieurs siècles, avec cette lenteur adorable qui était la tienne lorsque tu devais te livrer à des choses pratiques, faire une valise, ranger une maison, tu es la femme la plus lente que j'aie jamais connue, la plus lente et la plus rapide, quarante-quatre ans de ta vie passés comme un éclair très lent d'un seul coup avalé par le noir.