Mallarmé se montre aux prises avec les souhaits d'une enfant, sa fille sans doute, enfiévrée par la proximité d'une fête foraine. Bien qu'il se décrive alors comme pris dans ses rêveries - et les rêveries d'un aussi puissant poète, cela n'était pas rien...- il écoute l'enfant et l'emmène, au plus loin de la littérature éternelle, vers les baraques et les manèges. Ce qui le fait céder - mais céder n'est pas le mot : en vérité, il n'hésite pas un instant - c'est la voix réjouie de l'enfant, simplement la voix qu'il nomme ainsi : la voix claire d'aucun ennui. Je pense souvent à cette phrase minuscule. Je vis avec. Je n'ai jamais trouvé de plus fine définition de la présence, de l'amour et de la beauté. La voix claire d'aucun ennui : la poésie c'est suivre son coeur en allant à la fête.