Travailler sur la langue c'est agir sur le monde : si les nazis ordonnaient aux déportés de ne jamais parler de cadavre mais de marionnette devant l'amoncellement de corps martyres, c'est parce qu'il est plus aisé de brûler des marionnettes qu'un être humain. Nous avons deux corps greffés l'un sur l'autre, le corps de chair et le corps de langue. Quand de la douleur ou de la joie arrive à l'un, l'autre ressent les ondes. Quand le mensonge vient dans la langue, la mort pousse dans les chairs. C'est bien parce que certaines paroles nous tuent que d'autres paroles peuvent nous ressusciter.