La colère des saintes est plus terrible que celle du diable.

La poésie est la fille infirme du ciel, la silencieuse défaite du monde et de sa science.

Soit on adore le monde (l'argent, la gloire, le bruit), xoit on adore la vie (la pensée errante, la sauvagerie des âmes, la bravoure des rouges-gorges).

La seule faveur que le monde ait jamais fait à Emily a été de lui décerner en octobre 1856 un second prix pour son pain de seigle, à la foire d'Amherst.

Les abeilles dorées, qu'Emily arrachait à leur destin d'esclaves en les courronant dans ses poêmes, bourdonnent pour elle un requiem.

Les poètes sont des enfants ininterrompus, des regardeurs de ciel, impossibles à élever.

Emily sait quelque chose que les autres ne savent pas. Elle sait que nous n'aimerons jamais plus d'une poignée de personnes et que cette poignée peut à tout moment être dispersée, comme les aigrettes du pissenlit, par le souffle innocent de la mort. Elle sait aussi que l'écriture est l'ange de la résurrection.

Bien avant d'être une manière d'écrire, la poésie est une façon d'orienter sa vie, de la tourner vers le soleil levant de l'invisible.

Quand autour d'elle les ambitions se déclarent et que chacun veut être quelque chose, elle fait le rêve souverain de n'être rien et de mourir inconnue. L'humilité est son orgueil., l'effacement son triomphe.

La distance est la racine de la douceur. La vie ne serait rien sans la contemplation.