Les livres agissent quand ils sont fermés. Les voix, chère Marceline, ce sont les fleurs de l'éternel mises dans notre bouche. Elles fleurissent notre crâne de mort à venir. Elles ne s'éteignent pas avec nous, elles s'éloignent, et c'est le travail du poème que de les faire revenir près de nous. La voix de mon père avait quelque chose de la croûte d'un pain chaud. Elle s'ouvrait, se donnait, était par elle-même nourricière. Votre voix à vous : le chant d'une rivière inquiète qui ne dort jamais. Ce n'est pas une image. Je vais chercher là-bas de quoi éclairer ici. C'est ce qu'on appelle poésie n'est-ce pas ?
Quand je vis, la vie me manque. Je la vois passer à ma fenêtre, elle tourne vers moi sa tête mais je n'entends pas ce qu'elle dit, elle passe trop vite. J'écris pour l'entendre.
Je ne cherche pas à vous convaincre. C'est harassant, vain et au fond un peu cruel de convaincre. Je voulais juste vous dire qu'un jour, j'ai vu, planté dans un livre d'André Dhôtel, un panneau indicateur du paradis. La distance marquée ? Il n'y a pas de distance. L'éternel est là, sous nos yeux, sous nos pieds, dans une phrase.
J'ai retenu mon souffle pendant trente ans pour que mon chant éclate au zénith et qu'on ne doute pas, en m'entendant, que cette vie est le plus haut bien même si parfois elle nous broie.
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