Par instants je pense que nous ne mourrons jamais. À d'autres instants je pense que nous sommes plus perdus que des jouets dont un enfant ne se sert plus. La vérité, qui peut la dire ?
Si vous voulez vous faire aimer des hommes, Albe, commencez donc par les quitter : vous verrez comme alors ils sont doux. De vrais agneaux, de grands enfants perdus.
À vingt ans, on danse au centre du monde. À trente, on erre dans le cercle. À cinquante, on marche sur la circonférence, évitant de regarder vers l'extérieur comme vers l'intérieur. Plus tard, c'est sans importance, privilège des enfants et des vieillards, on est invisible.
Les braves gens tristes ont toujours prétendu que les choses étaient très compliquées et qu'il fallait beaucoup mûrir avant de les saisir. Ce discours sur la complexité des choses est, il n'y a pas d'autre mot, le discours d'un salaud, de celui qui s'adresse à l'enfant pour lui dire : tais-toi.
Il faut autant de génie - c'est-à-dire de courage, de songe, de patience et d'impatience, d'innocence et de ruse - pour trouver l'argent du loyer et de quoi vêtir des enfants que pour bâtir un chef-d'oeuvre.
Le travail des mères, c'est de protéger les enfants de la noire humeur des pères. Et les pères ? Leur travail est, je crois, de même nature : ils sont là pour garder les enfants de la trop vive folie des mères.
Passé un certain temps, l'enfant ne peut plus qu'en partir [de la famille] : il lui est devenu impossible de s'y faire entendre - parce qu'on le connaît trop et parce qu'on ne le connaît plus.
Devenir adulte, c'est oublier ce que l'on ne peut s'empêcher de savoir et dans quoi l'enfant - parce que la force lui est donnée avec sa faiblesse - passe ses heures : le désarroi des mots, la carence des amours et la lente corruption des rêves, soumis à tous les vents.
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